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17 octobre 2010

Mlle Renée

dyn003_original_447_397_jpeg_12527_812bcd62648c82a190d3259cbdfcb447Depuis quelques temps déjà, j'ai renoué avec mes anciennes amours (au figuré cela va s'en dire), et en l'occurrence avec Mlle Renée. Mlle Renée est barmaid dans un cabaret transformistes. Elle est ce qu'on appelle une transgenre. Trop grande, avec des épaules trop larges pour être une femme, mais dont la féminité de caractère, les gestes et les attitudes sont incompatibles avec son genre d'origine.

Elle est souvent vêtue d'une courte jupe de cuir noir, de bas à couture mettant en évidence des jambes musculeuses et nerveuses, qu'elle croise et décroise sans cesse, est chaussée de talons aiguilles. En la voyant derrière son comptoir, elle paraît une femme plantureuse au sourire un peu mystérieux. De près, son personnage équivoque, son apparence intrigue, le visage tout en angle, la poudre, le maquillage, En fait, il y a trop d'extravagances, trop de mise en scène.

Lorsque Renée parle, elle fait des geste, elle bouge les mains, elle fait tinter ses bracelets ce qui fait qu'au bout d'un moment, mon écoute est parasitée. Le bruit des bracelets m'agace. Pourquoi bouge-t-elle comme ça ? Je regarde les bracelets, des petits cercles d'argent, je les voie comme des pièces détachées, ajoutées, fausses. Subitement, je me demande si ses cheveux sont vrais ou si elle porte une perrruque. Ses cils me paraissent trop longs, ses yeux brillent trop, son regard  est trop sombre, un appel à tomber dedans. Et dans la foulée, tout me paraît déplacé, les bras habillés, la dentelle, les ongles peints, le décolleté plongeant sur une question, on ne voie rien. Souvent, je suis gêné, toutes ses phrases me paraissent doubles, théâtrales, excessives.

Elle s'exprime d'une curieuse façon, parlant d'elle à la quatrième personne : "..Nous nous sommes réveillés..."., ."...Nous avons pris notre café...", "... Nous sommes allés..." Je trouve cela un peu prétentieux, pour qui se prend-elle ? Il m'a fallu un certain temps pour comprendre, et j'ai alors ressenti un certain malaise lorsque j'ai enfin compris, qu'elle parlait d'elle et de son sexe (Nous), car bien évidemment, il/elle sont deux. Il y a  bien en elle la place pour deux personnes, car elle, Mlle Renée refuse de se faire opérer pour prendre l'identité de genre qui lui correspond le mieux.

Malgré tous ses petits travers, Mlle Renée me plait. De temps à autre, elle quitte le bar, circule, apporte un verre à une table. Pour ce faire, elle porte une jupe large, avec des plis. Au bout d'un moment, elle s'assoie devant le bar sur un tabouret et fume une cigarette en regardant la salle, calme sous ses cheveux bouclés, un peu raide, les épaules en arrières, les jambes croisées. Juchée sur son tabouret, elle réfléchie. On la regarde, on la regarde et on a qu'une chose en tête, ce qu'elle a entre les jambes. cette reflexion on se la fait non par ironie, ni par fascination mais plutôt d'un air rêveur.

Avant de tenir ce bar, Mle Renée a alterné suivant les opportunités, les métiers de transformiste, puis prostituée, pour revenir sur le devant de la scène et repartir se perdre dans les allées sombres, récolter de quoi se mettre à son compte et retrouver un semblant de respectabilité. Mle Renée a gardé de ses années de tapinage, quelques anciennes copines qu'elle s'évertue à aider à retrouver une "honorabilité" depuis longtemps évanouie, ainsi que leur place dans la Société.

 

 

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Commentaires
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ce que vous écrivez me fait totalement songer à une drag queen que je fréquentais jadis, elle se faisait appeler "Madame", elle avait sa propre chambre "rose" au-dessus d'un cabaret de belleville où elle faisait monter ses clients. C'est grâce à elle que j'ai compris ma nature bigenre. Elle était fascinante, à la fois sombre et lumineuse, souriante et chagrine. Aujourd'hui, il y a encore son empreinte d'elle sur moi, moi et mes deux sourires, mes deux personnalités, mes deux genres, mes deux visages opposés. Les trans fascinent, mais elles sont aussi profondément malheureuses et seules. Proches de la mort. Je suis devenu un peu comme elle, trouble, double, opaque. Je l'aime encore si intensément, cette madame, elle m'a marqué au fer rose :-)
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