Homosexualité en URSS
Voilà que je romps encore mon voeu de ne pas faire de ce blog un blog politique ou de revendications homosexuelles, mais y a des fois ou ça coince au point que j'ai envie de crier.
Pour les communistes, "l'homosexualité est un vice, des élites, résultant de la décomposition morale qu'engendrent inéluctablement le luxe aristocratique et le système capitaliste, oublieux de la sainte nature". Hum...
En tant qu'homophobe suprême, nous nommons Staline. La révolution bolchévique commence cependant par émanciper les homosexuels russes. Leur condition, régie par le Code Criminel de 1832, était vraiment pitoyable et elle ne s'améliora que dans les dernières années de l'ancien régime.
La révolution bolchévique de 1917 (une des nombreuses) abolit le code de 1832*, et les textes par lesquels elle le remplace en 1922 ignorant le crime de sodomie. Cela dit, les bolchéviques ne sont guère "gay friendly". Les grands leaders sont puritains : l'homosexualité n'est plus vouée au châtiment judiciaire, mais elle l'est de plus en plus au discours médical et thérapeutique. Enfin elle pâtit terriblement de son image aristogratique.
Mais c'est le Stalinisme qui impose une ligne homophobe radicale. L'article 121 du Code pénal créé par la Loi de 1934 recriminalise très durement l'homosexualité masculine rendant tout acte homosexuel passible de 3 à 5 ans d'emprisonnement, ce qui entraîne aussitôt de nombreuses arrestations. Pour les Staliniens, l'homosexualité n'est pas seulement un héritage déplorable de l'ancien régime, elle est aussi profondément liée au fascisme. "Extirpez l'homosexualité et le fascisme disparaîtra" déclare Gorki !
Pour Staline, les individus ne sont que des vis et des boulons au service de la Société Socialiste ; la sexualité a pour finalité la reproduction des producteurs ; un plaisir sexuel non orienté vers la reproduction est en déperdition d'énergie que ne saurait autoriser la société socialiste (ça ne vous rappelle rien, pour une fois le soviet suprême est en parfait osmose avec les églises romaine et orthodoxe).
Nikita Khrouchtchev au pouvoir de 1953 à 1964 est très homophobe lui aussi, associant l'homosexualité et formaliste esthétique, qu'il associe, sans doute en raison de ses origines paysannes , à l'intelligentsia (il traite du reste de "pédales" des peintres dont les oeuvres étaient trop modernes à son goût, lors de la visite d'une exposition en 1962).
La sclérose Brejnévienne fait le reste ; Dans les années 1980, le KGB arrête encore un millier d'homosexuels par an ; les lesbiennes risquent toujours l'internement psychiatrique (les soviétiques ont une prédilection voire un petit faible pour les hopitaux psychiatriques qui ne sait jamais démenti), générateur de séquelles à perpétuité ; et les catégories inférieures de la population concentrationnaire, où l'on trouve des condamnés de toutes origines et pour tous les motifs sont souvent menacés de viol (parfois collectif) et d'asservissement sexuel (c'est pas pour rien qu'on casse les dents de devant des prisonniers...)
La terreur induite par pareil système explique qu'il faille attendre la pérestroïka pour voir apparaître un authentique mouvent gay soviétique. Au jour d'aujourd'hui, la culture russe accuse un retard de plus de 35 ans sur celle de l'Occident.
* La loi de 1832 criminalise les actes homosexuels. La condamnation peut aller jusqu'à cinq ans d'Exil :